Les poules préfèreraient certainement être libres. Si elles doivent être détenues - et il n’est pas encore en notre pouvoir de les libérer, alors elles préfèrent avoir la possibilité de bouger, d’étirer leurs ailes, et d’interagir librement entre elles.
La réforme proposée donnerait aux poules une chose à laquelle elles aspirent. A moins d’éléments prouvant que donner aux poules ce qu’elles veulent nuit à d’autres animaux, il n’y a aucune raison de leur refuser ce soulagement.
Les arguments indémontrables basés sur des théories pour ou contre la réforme se neutralisent. Les éléments matériels témoignent tous de la nécessité d’accorder aux oiseaux ce qu’ils veulent. Si nous pensons qu’ils méritent réellement le droit à l’auto-détermination, alors c’est ce que nous devons faire.
Les éléments concrets suggèrent aussi que cette réforme pourrait être un des facteurs d’une stratégie à multiples facettes destinée à rendre la production d’œufs non-rentable et partant, non viable. Afin de mettre en œuvre une telle stratégie, qui exigerait aussi de faire baisser la demande d’œufs par d’autres moyens, les partisans de cette réforme doivent être attentif à ne pas sembler promouvoir les œufs produits par d’autres méthodes d’élevage.
Recommandations
* Au lieu de soutenir ou de condamner dans l’abstrait les réformes "welfaristes, les militants animalistes devraient analyser individuellement chaque mesure proposée.
* En analysant ces réformes, les militants devraient, pour tirer les conclusions, porter une attention particulière aux résultats concrets probables plutôt qu’aux théories.
* Ici comme ailleurs, les militants doivent être attentifs aux souhaits exprimés par les animaux, et leur donner plus de poids qu’aux théories des gens.
* Les réformes pour le bien-être qui offrent un soulagement de souffrance substantiel tout en augmentant les coûts de l’exploitation animale, devraient être privilégiées, tant que rien ne vient démontrer qu’elles sont par ailleurs nuisibles.
* En travaillant en faveur de ces réformes, les militants doivent faire attention à ne pas promouvoir, involontairement, les produits issus d'animaux élevés "humainement".
* En discutant de leurs désaccords, les militants doivent résoudre les conflits selon une approche constructive ; éviter les discussions conflictuelles, préferez les efforts conjoints visant à découvrir un terrain d‘entente, à trouver des éléments susceptibles de résoudre les différences, ou à parvenir à un consensus quand c’est possible, et accepter que des alliés diffèrent au sujet de théories indémontrables.
* En forgeant leurs stratégies, les militants doivent respecter la diversité tactique, et admettre que les changements sociaux, politiques et économiques majeurs tendent à survenir seulement après une période troublée pendant laquelle différents acteurs cherchent à atteindre le même but par divers moyens.
Conclusion
Les industries exploitant les animaux sont des entités multinationales immorales qui exercent un immense pouvoir économique et bénéficient de la faveur des gouvernements. Leur principale faiblesse est que, comme toutes industries de capitaux, elles ont besoin d’investisseurs qui, à leur tour, ont besoin de taux de rentabilité élevés. Elles pourraient être conduites à cesser leurs activités grâce à une stratégie à multiple facettes, où les efforts pour réduire la consommation via l’éducation au véganisme et d’autres tactiques s’associent aux efforts pour augmenter les coûts par diverses méthodes, y compris l’action directe et les réglementations coûteuses. Puisque nous avons le devoir moral d’écouter les animaux déjà existants et de travailler pour la libération des futures générations d’animaux, les efforts pour améliorer le bien-être animal devrait être entrepris dans le cadre de ces stratégies.
Les réformes qui rendent le confinement intensif illégal et/ou exigent de l’espace pour la recherche de nourriture réduisent nécessairement le nombre d’animaux susceptibles d’être tenus en esclavage sur n’importe quelle parcelle de terre. La terre agricole est une ressource limitée qui va en diminuant ces dernières années en raison de l’accroissement de la population humaine, de l’étalement urbain, de la désertification et probablement du changement climatique. En bref, la terre agricole devient de plus en plus rare et chère. Par conséquent, de toutes les réformes pour le bien-être, celle qui requiert davantage de superficie par animal pourrait être la plus utile stratégiquement, tout en remplissant son rôle principal qui est d’apporter un soulagement immédiat à des souffrances aiguës.
Prendre ces facteurs en considération devrait inciter les militants animalistes à soutenir, ou au moins à s’abstenir de condamner, des dispositions qui à la fois permettent de soulager des souffrances et d’augmenter les coûts de production. Cela demande que chaque disposition pour le bien-être animal soit étudiée séparément. Ces analyses peuvent aider à sortir le mouvement de l’immobilisme induit par l’argumentation abstraite sur le "bien-être".
Les animaux existent. Lorsque les militants animalistes se disputent plus qu'ils n'agissent, les animaux déjà existants en subissent les conséquences. Les animaux ont le droit à l’autodétermination. Leur souhaits, plutôt que nos théories, devraient nous guider dans les actions que nous menons en leur nom. Les animaux veulent être libres et soulagés de leurs souffrances.
Le bien-être animal et la libération des animaux ne devraient pas être des projets séparés. Dans le cas de l’élevage industriel, les réformes pour le bien-être peuvent apporter un soulagement immédiat tout en participant aux stratégies économiques visant à conduire les industries d’exploitation animale vers la cessation d’activité. Pour le moment, l’augmentation des coûts de l’alimentation liée au boom des biocarburants rendent les élevages industriels plus que jamais vulnérables économiquement. C’est le moment de mettre de côté nos différences basées sur des théories afin d’agir pour les animaux qui vivent aujourd’hui dans le monde réel.
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