animal sujet publie les traductions d’articles animalistes : militantisme, résistance et agentivité animales, cohabitation humains-animaux...

Stratégies pour promouvoir les droits des animaux...(2)



Dans  la pratique, arguments  extrinsèques et  intrinsèques  sont  généralement  combinés. Le militant peut vouloir  avancer  un  argument  intrinsèque,  mais  penser qu’il est insuffisant et qu’il nécessite un complément extrinsèque. Lewis (2006) donne un exemple des complications qui en résultent pour les militants :


Il s'ensuit…que les militants animalistes voudraient défendre le fait que les similitudes entre humains et animaux rendent l’expérimentation animale injustifiable. Toutefois, lorsqu’ils utilisent les arguments scientifiques, ils affirment justement le contraire - l’expérimentation animale est mauvaise parce que les autres animaux sont différents de nous ! …ils en sont réduits à argumenter que "Nous sommes tous semblables, mais pas trop". C’est une position rhétorique peu convaincante selon laquelle les animaux nous ressemblent juste assez pour justifier l’interdiction de l’expérimentation animale tout en étant juste assez différents pour que celle-ci soit à 100% inapplicable aux humains. Que cela soit vrai oui non, cela ne constitue pas un argument solide et cohérent.

En fait, c’est l’image inversée des affirmations confuses des vivisecteurs, à savoir que les animaux sont suffisamment différents de nous pour faire de la vivisection une pratique moralement acceptable, mais suffisamment semblables pour faire que ses résultats soient fiables. Au lieu de mettre en évidence cette confusion, certains abolitionnistes la reproduisent involontairement. Oui, nous sommes des animaux à la fois semblables et différents, mais pour le public non concaincu et conservateur, l’argument résonne comme une tentative désespérée de tirer profit de deux affirmations contradictoires.

Les arguments extrinsèques peuvent avoir leur place dans un contexte intrinsèque, par exemple comme garantie que le végétarisme ou l’abolition de la vivisection peuvent promouvoir une santé et une médecine meilleures, mais s’il ne leurs est pas assigné de rôles clairement subordonnés, ils peuvent dénaturer le véritable propos, qui est intrinsèque et éthique. Pour les besoins de l’analyse, je traiterai , dans les deux cas, des types et sous-types d’arguments séparément.


Arguments extrinsèques

- Arguments d’autorité



Les militants citent souvent des personnes comme Leonard de Vinci, Perce Shelley, George Bernard Shaw et Mohandas Gandhi, sans oublier des pop stars et des acteurs, qui sont - ou furent, végétariens. Il existe aussi nombres de tentatives pour prouver que Jésus était végétarien (par ex. Regenstein 1991: 181; Akers 2000, tout au long de l’ouvrage).

Walters et Portmess ont fait le commentaire suivant au sujet de cette tactique : "L’argumentation en faveur du végétarisme éthique est plus affaibli que renforcé par les références, faites sans discernement, aux sympathisants célèbres lesquels, au mieux, ont écrit une ou deux lignes ambiguës sur le régime alimentaire" (2001a: x). Mais l’argument resterait faible quand bien même tous ces grands noms invoqués seraient connus pour être, sans l’ombre d’un doute, de véritables végétariens car pour chaque végétarien célèbre il y a une centaine ou plus de carnivores célèbres, et qui doit-on suivre ? Même s’il vous semble que ces quelques végétariens sont plus importants que les carnivores, en vous basant sur leurs autres convictions ou accomplissements, êtes-vous prêts à accepter leurs opinions sur tout ? Et si ce n’est pas le cas, pourquoi accepter leur opinions sur la consommation de viande - à moins de partager ces opinions de toutes façons, pour vos propres raisons ?

Les mêmes questions s’appliquent aux fameux antivivisectionnistes comme Albert Schweitzer (Fadali 1996: 53), Victor Hugo (ibid.: 54), Cardinals Newman et Manning (Ruesch 1983: 315), Tolstoï, Mark Twain (ibid.: 54) et Helena Blavatsky (page 1999: 174). Car nous pouvons aussi trouver parmi les abolitionnistes des personnalités douteuses comme Bismarck (Ruesch 1983: 146) et Carlyle (ibid.: 323) et nous pouvons difficilement recourir à ces autorités quand nous sommes d’accord avec eux et les rejeter quand nous ne le sommes pas.

De plus, l’incohérence latente du recours aux citations de "sympathisants célèbres" tient à son manque de pertinence avec la question des droits des animaux. Cela peut nous inspirer, en tant que militants convaincus pour la libération animale, d’apprendre que des humanistes comme César Chavez, l’épouse et le fils de Martin Luther King sont végétariens, et sans doute qu’une personne qui envisage déjà d’arrêter de consommer de la viande pour des raisons liées aux animaux, pourra être définitivement persuadée de la faire, grâce à l’exemple de modèles dignes d’estime. Mais il est probable que le spéciste considèrera le végétarisme de cette personne comme un détail sans importance. Il peut toutefois s'avérer approprié de citer une phrase pertinente que cette personnalité aura dite sur le sujet - les mots, plutôt que l’individu qui en est l‘auteur, étant ce qui importe.


- Les personnes célèbres qui ont aidé les humains et les animaux

"De nombreux antivivisectionnistes se sont distingués par des services à l’humanité" écrit Ruesch (1983: 54). Scharwtz note : "S’il est vrai qu’il existe des gens qui aiment les animaux mais sont cruels à l’égard des gens, certains des plus grands humanistes de l’histoire étaient végétariens " (1992: 238). Ces remarques, visant à réfuter l’accusation selon laquelle les militants animalistes seraient misanthropes, non seulement reposent sur l’autorité de ces célébrités, mais aussi admettent implicitement la supériorité humaine en cherchant à prouver le bien-fondé du militantisme pour les droits des animaux en l’associant à la solidarité envers les humains.

Considérons l’absence notable d’affirmation réciproque de la part des militants pour les causes humaines. Les portes-paroles d’organisations de protection de l’enfance ne se sentent pas obligés d’affirmer qu’ils se soucient des animaux. Il n’y a que les militants animalistes pour signaler qu’en Grande-Bretagne ainsi qu'aux Etats-Unis, les fondateurs et les premiers sympathisants des organisations de protection de l’enfance avaient également créé la SPCA dans ces deux pays (mentionné par Ruesch 1983: 54 et Linzey 1994: 37). Il ne viendrait  pas à l’idée  d’une  organisation  britannique  ou  nord-américaine  pour la prévention de la cruauté envers les enfants de