il loue pratiquement la vivisection pour elle-même. Joint, pour la forme, à un souci pour la santé humaine, il déclare qu'il est opposé en principe à l'interdiction des tests :
parce que cela brouille la frontière entre les gens et les animaux. Il dit : "Mon souci est de définir où se trouvent les frontières morales : Il n'y a qu'une définition de celles-ci que l'on peut tenir pour certaine : elles passent entre notre espèce et les autres (Anon 2006)
Confronté
à de telles attitudes, nous ne pouvons que, très prudemment, voir les droits
des humains et les droits des animaux comme coexistants "aussi longtemps
que les droits humains n’inclut pas le 'droit ' d'exploiter les animaux de
quelque façon que ce soit." (Lee 2006)
Le
point de vue "Une même lutte, un même combat" existe, je le crains,
plus dans la rhétorique des militants animalistes (Taylor 2005: 4) que dans
l’esprit du public ou des militants pour les droits humains. Cela ne semblait
pas faire partie des préoccupations d’Amnesty International lorsqu’ils ont
accepté les expérimentations sur des cochons dans le cadre de recherche sur la
torture en 1977-78 (Noske 1997: 37) pas plus qu’il n’apparaissait dans les
conceptions de Delia Padron, la représentante espagnole de l'organisation,
lorsque celle-ci s’était déclarée "‘surprise’ des efforts mis en œuvre
pour faire reconnaître des ‘droits humains’ aux grand singes alors que de
nombreux humains n’en bénéficient toujours pas" (Deutsche Press-Agentur
2006).
Lorsqu’ils
établissent un parallèle entre droits/libération des humains et
droits/libération des animaux, les militants devraient se demander s’ils ne
feraient pas mieux de promouvoir leur propre mouvement plutôt que d’être à la
remorque de celui, plus respectable, des droits humains.
- Recours aux arguments opportunistes
Les
arguments pour le végétarisme ou les droits des animaux font souvent appel à
des considérations opportunistes comme la santé humaine, l’environnement, la
pauvreté et la paix dans le monde.
Autrefois,
les ordres monastiques avançaient l’argument de la santé pour justifier leur
végétarisme en partie pour des raisons de survie, dans la mesure où l’Eglise
l’associait à l’hérésie, de sorte que les motivations éthiques du végétarisme
étaient éliminées, alors que les préoccupations pour la santé étaient vues
comme légitimes. (Akers 200: 133). On peut voir un parallèle avec certains
militants actuels pour qui les droits des animaux ont une connotation douteuse
- "l’hérésie" médiévale correspondant à l’actuel
"extrémisme" - au point que le recours à des arguments opportunistes
paraît plus réaliste, voire plus sûr.
Richard
Schwarz défend le végétarisme sur le terrain de la santé, de la compassion pour
les animaux, de la protection de l’environnement (1992: 233) et de la paix. Il
évoque la paix dans la mesure ou la famine et les dommages à l’environnement
sont aggravés par la production de viande, et ou la pénurie de nourriture peut
conduire à la guerre (1988: 64). Sur la page d’accueil de leur site,
l’association en faveur du végétarisme Viva! (2006), place les animaux en
dernier :
"Manger de la viande cause des dommages à l‘environnement, nuit à la santé humaine, contribue à la faim dans le monde et inflige d’immenses souffrances à des billions d’animaux à travers le monde. Viva! croit que la solution de tous ces problèmes est entre nos mains : la meilleure façon de mettre un terme à cette destruction et à cette cruauté est d’arrêter dès maintenant de manger des animaux."
Viva!
Se soucie essentiellement des animaux ; sur sa page d’accueil et celles consacrées
aux campagnes, on peut voir le message suivant qui clignote : "Toutes les
7 secondes un mouton a la gorge tranchée dans un abattoir ". Le compte
rendu d’une tournée de promotion du végétarisme couronnée de succès comporte le
commentaire suivant : "Je crois que cela dénote un changement fondamental
dans l’attitude des gens vis-à-vis de la cruauté envers les animaux, la santé
et l’état de la planète". Ici, au moins, les animaux sont cités en
premier, mais leur souffrance n’est pas considérée comme un motif suffisant
pour justifier le végétarisme.
La
littérature des militants antivivisectionnistes parmi les plus engagés peut
comporter une liste de résultats faussement positifs et faussement négatifs
d’expériences sur les animaux et des affirmations d’éminents médecins selon
lesquelles la vivisection n’est pas scientifique. Le slogan de la National
Anti-Vivisection Society* proclame que l’expérimentation animale est "non
fiable, contraire à l’éthique, inutile" - comme si la considération éthique
passait mieux discrètement insérée entre deux considérations
anthropocentriques.
Noah
Lewis mentionne plusieurs organisations anti-vivisection et pour les droits des
animaux qui mettent essentiellement en avant des réflexions sur la
"mauvaise science" attribuant un rôle moindre aux revendications
centrées sur les animaux. Pire encore, pense-t-il, sont les groupes comme le
Physicians Commitee for Responsible Medecine* qui rejette les motifs liés aux
animaux, bien que révélant leur vraie sympathie de diverses façons. Le PCRM
"n’éprouve pas de problème à travailler fréquemment avec Peta…beaucoup de
leurs employés et de leurs membres soutiennent les droits des animaux. "
(Lewis 2004). Leur comportement suggère à la fois frilosité et déloyauté, et
pourtant leur manque de franchise est vain, puisque "qu’à l’intérieur de
la communauté médicale, ils sont perçus comme une organisation animaliste
"(ibid.), ou comme ce que je serais tenté d’appeler une organisation écran
du mouvement animaliste. Le recours à l'argument santé humaine peut sembler
suspect même - et particulièrement, lorsque le militant défend les droits des
animaux. Lorsqu’une organisation fondée pour promouvoir le végétarisme ou pour
s’opposer à la vivisection pour des motifs liés en grande partie aux animaux
fait triomphalement étalage des dernières découvertes sur les bienfaits du
végétarisme pour la santé ou sur le dernier scandale concernant la nocivité
d’un médicament, les gens suspectent une arrière-pensée et le mouvement perd en
crédibilité.
En
plus de paraître malhonnêtes, les arguments opportunistes échouent à la
question-test "Et s’il s’agissait d’humains ?" Dans ce cas, la
référence aux atteintes aux droits humains peut servir ici à mettre en évidence
un raisonnement de
type "deux poids de mesure"
; en
effet, nous n’utiliserions pas, pour défendre des humains opprimés, le